Je vous avais dit que la BBC n’était certainement pas le seul groupe médiatique à incriminer puisque les télévisions dépendant du groupe de Rupert Murdoch n’étaient en réalité pas favorables non plus à la diffusion de cet appel à donner pour Gaza.
J’avais pointé la responsabilité du lobby sioniste dans cette affaire. Il est vrai que, parler de ce lobby chez les pro Palestiniens est courant. On en parle dans des réunions, dans des médiats plus ou moins confidentiels mais on n’en entend jamais parler dans les journaux de grande diffusion ni dans les radios ou télévision qui captent l’attention du grand public.
A croire que ce lobby est quelque chose que nous, ou les Palestiniens, avons inventé.
Sauf que ceux qui fréquentent la presse sioniste savent que ce n’est pas une invention et que les sionistes n’hésitent pas tantôt à se vanter de leur pouvoir de pression.
Et sauf que l’affaire de la BBC a permis pour la première fois à un journal londonien à grand tirage de s’exprimer ouvertement sur le rôle de ce lobby.
L’article que je vous propose vaut son pesant d’or, il est d’une nature inédite en Europe. Il traduit le courage retrouvé de certains journalistes choqués par la sauvagerie sioniste mais également, à n’en pas douter, des frictions de plus en plus importantes au niveau des sphères dirigeantes britanniques ; un affrontement entre ceux qui sont domestiqués par le lobby sioniste et ceux qui veulent affranchir leur pays de son influence.
Le rapport secret au cœur de la paranoïa de la BBC sur Gaza
Par Keith Dovkants, Evening Standard (UK) 27 janvier 2009 traduit de l’anglais par Djazaïri
Ils avaient chargé Malcolm Balen, un directeur de rédaction, d’enquêter sur des allégations selon lesquelles la couverture par la BBC du conflit israélo-palestinien était biaisée.
En dépit du secret, il y a eu des fuites, notamment au sujet de la conclusion de Balen selon laquelle les reportages de la BBC sur le Moyen-Orient étaient biaisés en défaveur d’Israël.
Pendant ces jours mornes de 2004, le rapport fut perçu comme presque anecdotique par les grand patrons de la BBC. Ce qui posait vraiment problème, d’était que des positions pratiquement inexpugnables avaient été démolies par des allégations d’insuffisance journalistique. Les nouvelles têtes dirigeantes de l’entreprise, dont le PDG Mark Thompson, venaient de recevoir une dure leçon. Ils ne souffriraient pas le même sort que Greg Dyke.
Plett, qui avait couvert le siège des bureaux de Yasser Arafat en Cisjordanie, témoignait sur le transfert en hélicoptère vers un hôpital d’Arafat qui était en fin de vie. Elle avait déclaré : « Quand l’hélicoptère transportant le vieil homme frêle s’est élevé au dessus de l’immeuble en ruines, je mes suis mise à pleurer… »
Ses propos en avaient scandalisé certains, notamment parmi les israéliens et les Juifs qui se souvenaient d’Arafat comme d’un ennemi, indigne de sympathie. Les plaintes affluèrent, mais la BBC les rejeta – dans un premier temps. La pression s’accrut et près d’un an après l’émission, la commission des plaintes des gouverneurs de la BBC décidait que les paroles de Plett avaient outrepassé « les critères d’impartialité.»
Helen Boaden, directrice de l’information avait qualifié cet épisode « d’erreur éditoriale. » Mme Boaden est une des personnes qui a conseillé le PDG, Thompson, sur la décision relative à l’appel aux dons pour Gaza.
En 2002, Guerin avait affirmé avoir été visée par des soldats Israéliens qui, disait-elle, lui avaient délibérément tiré dessus pendant une manifestation à Bethléem. Un an plus tard, Israël boycottera la BBC en l’accusant de «profond parti pris» dans ses reportages. Puis, pendant la guerre au Liban en 2006, elle fut accusée de fausses informations pour avoir affirmé qu’une ville proche de la frontière israélienne avait été «anéantie» par les forces israélienne. « Je n’ai pas vu un seul bâtiment qui n’est pas endommagé d’une manière ou d’une autre, » avait-elle déclaré.
Mais Alex Thomson, qui rendait compte le même jour pour Channel 4 au sujet de la même ville, Bint Jbeil, présentait une approche différente. Il indiquait que les faubourgs de la ville «n’ont pratiquement pas été touchés par l’attaque israélienne.»
Pourtant, Bowen a lui aussi ressenti la pression des partisans d’Israël. En 2000, il avait couvert le retrait israélien du Liban. Comme d’habitude, il avait beaucoup d’avance sur ceux d’entre nous qui suivaient cette affaire et, le 23 mai, alors que les Israéliens évacuaient sous le couvert de blindés et de chasseurs-bombardiers, Bowen et son équipe s’étaient arrêtés pour filmer près de la frontière israélienne. Il était avec son chauffeur et interprète Abed Takkoush, un personnage très connu et très populaire chez les journalistes à Beyrouth. Abed travaillait pour la BBC depuis le début de la guerre civile libanaise en 1975 et Bowen et lui se connaissaient bien.
Près de la frontière, Bowen et son cameraman sortirent de la Mercedes d’Abed pour filmer. Quand ils furent à environ une cinquantaine de mètres de la voiture, un tank israélien fit feu sur le véhicule, le transformant en boule de feu. Abed parvint à s’en extraire par la fenêtre mais il décéda quelques minutes après.
Bowen a mené une longue et difficile campagne pour que justice soir rendue à cet homme et à sa famille. Il pense que les Israéliens avaient délibérément visé des civils, un crime de guerre selon les conventions internationales.
Les Israéliens ont dit que c’était une erreur tragique. A ce jour personne n’a été sanctionné pour ce fait. Sauf, peut-être, Bowen. Malgré sont perfectionnisme reconnu en matière d’objectivité, Andrew Balcombe, président de la Fédération Sioniste, avait écrit à la BBC en exigeant la nomination d’un nouveau rédacteur en chef pour le Moyen-Orient. Bowen ne pouvait pas être impartial, disait-il, parce que l’incident avec Abed Takkoush pouvait avoir contaminé (ses) opinions au sujet d’Israël… »
On créditera le BBC d’avoir résisté aux pressions et Bowen est resté une de ses valeurs sûres de la rédaction Moyen-Orient. Mais à quelles pressions a-t-elle cédé ?
« J’ai enquêté là-dessus et je suis convaincu que cette politique est dictée au sommet à cause de son énorme caractère sensible, » affirme-t-il. La BBC traite du conflit Israël-Palestine comme elle ne le fait pour aucun autre sujet. Le message est : ne pas se mettre les Israéliens à dos. » Il veut prouver son point de vue par des révélations sur le module de formation interne de la BBC à l’intention des journalistes qui couvrent le Moyen-Orient. On instruit les journalistes de respecter une série de règles basées sur ce que Barkho appelle un «glossaire,» un ensemble de mots et de phrases que les journalistes doivent utiliser – ou éviter d’utiliser.
« Seulement 24 de ces mots ont été rendus publics, » dit-il. « Le reste est confidentiel. » Il indique avoir vu le glossaire dans son intégralité et affirme qu’il conforte sa perception de la politique de la BBC comme visant à ne pas provoquer Israël.
« Les instructions données aux journalistes sont claires, » dit-il. « C’est : ne dites pas les choses telles qu’elles sont. Ce n’est pas une politique qui encourage l’impartialité, elle est biaisée dès le tout début.»